Un train au pied du Mont-Blanc
Histoire et technique du Mont-Blanc Express

1900-1950

Côté français

À partir de l’inauguration de la ligne, le PLM exploite cette dernière selon les plans initiaux, et seulement à la belle saison. La compagnie emploie un grand nombre de véhicules (191), dont 164 étaient moteurs, et seulement 27 devaient être remorqués. La période qui s’étend jusqu’aux années 1950 est la plus rentable de toute l’histoire de la ligne.

Le trafic marchandises est relativement soutenu : le train achemine dans la vallée de Chamonix des biens de consommation est d’équipement, et en sens inverse prend en charge les productions montagnardes, par exemple du bois, des pierres et du bétail. Le train convoie même de la glace extraite des glaciers vers la région de Lyon : à la belle saison, 50 tonnes de glace sont ainsi expédiées quotidiennement de la gare des Bossons.

Fourgon automoteur EDf 201 à Chamonix, peu après l’ouverture de la ligne.
Fourgon automoteur EDf 201 à Chamonix, peu après l’ouverture de la ligne. Auteur : The Street Railway Review, volume XIV, 1904.

À partir de 1911, le principal trafic marchandises est celui de l’usine chimique et métallurgique de Chedde. Ce trafic est florissant pendant la guerre, alors que les autres activités se trouvent drastiquement réduites.

Après la Première Guerre mondiale, le tourisme reprend de plus belle. Les premiers jeux olympiques ont lieu à Chamonix en 1924. Les besoins de transports en hiver augmentant, l’exploitation est assurée à longueur d’année à partir de 1920, mais seulement jusqu’aux Tines. Au-delà, l’enneigement et les risques d’avalanche sont trop importants. Un chasse-neige à turbine est donc livré en 1922. Puis entre 1925 et 1930, on construit cinq galeries paravalanches entre les Tines et Montroc, ainsi qu’un mur en forme de chevron près de la Joux. À partir des années 1930, le train peut ainsi monter à Montroc avec une plus grande amplitude que précédemment, la fermeture hivernale ne concernant plus que trois mois, de janvier à mars. Le tronçon entre Montroc et la frontière suisse est desservi pour la première fois à l’hiver 1935-1936, mais par la compagnie suisse du Martigny-Châtelard (voir aussi ci-dessous). Ce n’est qu’à l’hiver 1937-1938 que le PLM décide d’assurer lui-même cette desserte.

En 1937, le Front Populaire entreprend la nationalisation des sociétés de chemin de fer (Nord, Est, Paris-Orléans, PLM, Midi, etc.) au sein de la SNCF, avec effet au 1er janvier 1938. La ligne de Chamonix ne fait pas exception. La nationalisation ne s’accompagne cependant d’aucun changement notable : la SNCF exploite la ligne dans la continuité du PLM, avec le parc de véhicules PLM ré-immatriculés.

Après guerre, la direction de la ligne prend des initiatives pour attirer la clientèle : horaires améliorés, nouveaux arrêts facultatifs, véhicules panoramiques. Cependant, des améliorations plus conséquentes du confort et de la vitesse passaient par un matériel neuf et une rénovation des installations fixes. Ces projets se concrétiseront dans les années 1950.

Documentaire SNCF de 1958 sur la ligne de Chamonix, faisant la part belle au parc de matériel d’origine (Z 200).

Côté suisse

Les premières années, le chemin de fer n’est exploité que cinq ou six mois par ans, à la saison d’été. Jusqu’en 1910, le MC n’assure pas lui-même l’exploitation, mais la sous-traite aux CFF qui emploient leur propre personnel. L’activité de la ligne est réduite drastiquement pendant la Première Guerre mondiale.

Après guerre, les projets hydroélectriques se développent rapidement en Suisse, car le pays a souffert de sa dépendance énergétique en charbon. Les CFF, qui électrifient leur réseau, lancent au début des années 1920 un projet de barrage hydroélectrique sur le plateau de Barberine, sur les hauteurs du Châtelard. Ils font appel au chemin de fer Martigny-Châtelard pour le transport des matériaux. En outre, un funiculaire est construit à partir de Châtelard-Giétroz, suivi d’une voie étroite jusqu’au pied du barrage, exploitée à la vapeur. Le trafic marchandises monte en flèche : 23 023 tonnes en 1924, contre environ 3 000 tonnes avant la guerre. Le MC ne peut pas faire face seul à la demande : les CFF acquièrent eux-mêmes deux automotrices et six wagons.

Construction du mur du barrage de Barberine.
Construction du mur du barrage de Barberine. ETH-Bibliothek Zürich, Bildarchiv.

L’activité liée au barrage représente une période faste pour la compagnie, de courte durée cependant. La concurrence automobile puis la crise de 1929 provoquent une baisse marquée du trafic voyageurs et marchandises. Pour redresser la situation, le MC entreprend des efforts de rationalisation. Ainsi, le chemin de fer acquiert en 1926 les deux automotrices construites pour les CFF. La locomotive à vapeur puis les locomotives électriques à crémaillère sont revendues en 1927 et 1930. En 1930, la compagnie se sépare du tramway de Martigny, largement déficitaire, et fait construire sa propre voie, séparée de celle du tramway.

À partir de 1931, le chemin de fer assure un service d’hiver. Au début, il est plutôt aléatoire sur la partie haute de la ligne, principalement entre le Châtelard et Finhaut, car la compagnie ne dispose pas de moyens de déneigement. Ainsi, en 1931, le Châtelard-Frontière ne peut être atteint que 92 jours entre octobre et mars. La situation s’améliore à partir de 1933 avec l’acquisition d’un chasse-neige, puis en 1935 avec la construction d’une galerie paravalanche qui permet l’exploitation réellement à longueur d’année. Les hivers 1935-1936 et 1936-1937, le MC assure même la desserte sur le tronçon français entre Vallorcine et Montroc-le-Planet, le PLM ne pouvant pas la prendre en charge.

En 1938, la vitesse des trains est relevée, ce qui raccourcit le parcours entre Martigny et le Châtelard de 20 minutes. Ces efforts, ainsi qu’un développement de l’offre touristique, permettent de redresser les comptes de la compagnie à partir de 1936-1937.

La Seconde Guerre mondiale provoque une disparition de tout trafic touristique : la frontière française est fermée, et l’accès aux Suisses à la vallée du Trient est rendue difficile par la mobilisation des troupes. Cependant, le MC est utilisé abondamment pour l’acheminement des troupes et du matériel. À la fin de la guerre, le tourisme reprend ; le chemin de fer voit notamment passer de nombreux permissionnaires américains.

Dernière mise à jour : 1er mai 2021. © Christophe Jacquet, 2000-2023. Mentions légales et droit d'auteur. Contact. Plan du site.
Fermer